Un débat tant attendu…
Les circonstances sanitaires nous ont imposé un congrès en deux temps. En novembre 2020, après trois ans et demi de mandat et dans l’impossibilité de nous réunir physiquement, nous avons tenu une première phase de notre congrès pour le renouvellement des instances nationales, sous la forme d’un vote par correspondance, qui a permis à un Conseil national et un Bureau national renouvelés de se mettre en place dès janvier 2021. Mais ce n’est que les 13 et 14 novembre 2021 que nous avons enfin pu nous réunir pour des débats tant attendus.
Essentiel dans un congrès, le débat autour du rapport d’orientation s’est tenu dans une ambiance constructive et de grand respect mutuel. Il s’est poursuivi par la présentation et le vote sur les amendements qui restaient en discussion, puis s’est conclu par le vote du rapport d’orientation ainsi amendé, qui a reçu une très large majorité.
Les coups de projecteur que nous avons donnés en introduction au débat, et que nous rappelons dans ces deux articles, ne se substituent pas au rapport d’orientation, que chacun·e pourra lire ou relire dans ce numéro de Palsol.
Un aperçu de la situation actuelle
Les Palestiniens font face à un gouvernement israélien d’extrême extrême-droite, qui ne se donne aucune limite, comme en témoigne l’ordre militaire pris par Benny Gantz, le ministre israélien de la Défense, de déclarer comme organisations terroristes six des plus grandes organisations palestiniennes de défense des droits de l’Homme, de réputation internationale, puis d’émettre à leur encontre un ordre militaire d’interdiction. Une offensive inimaginable qui a soulevé l’indignation dans le monde entier, sans susciter de réactions officielles à la hauteur de la menace.
La colonisation se poursuit à un rythme encore accéléré en Cisjordanie et à Jérusalem, l’armée d’occupation protège les agressions des colons et réprime violemment les manifestations des Palestiniens. La résistance aux projets de colonisation se développe dans des formes innovantes comme à Beita. A Jérusalem, la population résiste aux projets d’expulsion, mais les destructions de maisons se poursuivent. La population de Gaza a subi des bombardements d’une intensité inimaginable, et lutte pour continuer à exister malgré un blocus destructeur depuis plus de 14 ans. Les réfugiés palestiniens sont dans une situation catastrophique, notamment au Liban. La situation sanitaire, au-delà de ses conséquences propres pour la population palestinienne, réduit dramatiquement la présence des militants internationaux.
Après l’annulation des élections palestiniennes par le président Mahmoud Abbas, la plupart des Palestiniens ont perdu toute confiance dans leurs institutions politiques actuelles. C’est sur le terrain qu’ils ont manifesté leur volonté d’unité pour résister aux agressions israéliennes. Après les formidables mobilisations de la jeunesse palestinienne de Jérusalem, c’est l’ensemble de la population palestinienne, y compris en Israël même, qui s’est soulevée en mai et juin contre l’oppression qu’elle subit.
Au cours des deux dernières années, la Palestine a marqué des points dans les instances et juridictions internationales. L’ouverture de l’enquête de la Cour pénale internationale le 3 mars 2021 à l’issue d’une longue procédure est un succès déterminant et un premier pas vers la fin de l’impunité. Un an auparavant, c’est en février 2020 que le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU a enfin décidé de publier une base de données des entreprises impliquées dans la colonisation israélienne. Et l’arrêt du 11 juin 2020 de la Cour européenne des droits de l’homme a exprimé très clairement que l’appel au boycott fait partie de la liberté d’expression politique. Une énorme victoire dans laquelle l’AFPS, avec ses partenaires, a joué un rôle particulièrement important.
Mais ni les États-Unis de Biden, ni la France, ni l’Union européenne, ne se sont montrés à la hauteur de la situation. La nouvelle administration Biden cherche avant tout à faire baisser l’intensité du conflit pour avoir les mains libres ailleurs. L’Europe reste divisée et impuissante. Et en France, le président de la République affirme une position de plus en plus ouvertement pro-israélienne, illustrée par sa scandaleuse déclaration sur le « droit d’Israël à se défendre » au plus fort des bombardements israéliens contre la Bande de Gaza.
Savoir nommer l’apartheid pour mieux le combattre
L’oppression que subit le peuple palestinien a un nom, c’est un régime d’apartheid. L’apartheid n’est pas un slogan, c’est un régime institutionnalisé de domination raciale et d’oppression parfaitement défini par le droit international, c’est un crime contre l’humanité que chaque État et chaque institution internationale a le devoir de combattre.
Les organisations palestiniennes de défense des droits de l’Homme y travaillent depuis des années, et le rapport qu’elles ont produit en décembre 2019 à destination du comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination a été déterminant.
L’apartheid vise le peuple palestinien dans toutes ses composantes, en le fragmentant pour mieux le contrôler. Demander l’élimination du régime d’apartheid subi par les Palestiniens, c’est porter l’exigence d’un combat universel pour les droits. C’est aussi affirmer qu’aucun projet d’avenir ne peut être porteur de paix si le point de départ n’est pas profondément modifié.
L’adoption de cette analyse par l’AFPS est un long parcours, qui s’est concrétisé par le lancement de notre campagne en mai 2021. Avec la publication de rapports internationaux, notamment celui de Human Rights Watch en avril, la prise en compte de cette analyse s’étend très rapidement dans le monde entier.
D’abord défendre les droits du peuple palestinien
L’objet de notre Association est le soutien au peuple palestinien, notamment dans sa lutte pour la réalisation de ses droits nationaux et la défense des droits humains de l’ensemble des Palestiniens. Nous ne nous substituons pas aux Palestiniens dans l’élaboration de leurs choix politiques, et c’est à eux seuls que revient le choix de la manière dont ils exerceront leur droit à l’autodétermination. L’AFPS ne se prononce donc pas, à la place des Palestiniens, sur une « solution » (qu’elle soit à deux États, à un État, etc.).
Parmi les droits du peuple palestinien, le droit à l’autodétermination est un droit essentiel. Nous exigeons la fin de l’occupation et de la colonisation par Israël du territoire qu’il a conquis et occupé illégalement par la force en 1967, et défendons le droit du peuple palestinien à établir son État sur l’ensemble de ce territoire. Ce droit est inséparable des autres droits du peuple palestinien, et notamment du droit au retour des réfugiés palestiniens.
Nous soutenons les Palestiniens dans leur lutte pour l’autodétermination et dans leurs combats pour exercer leur droit à vivre sur leur terre, étudier, travailler, développer leur culture, construire leur avenir et circuler librement quelle que soit la perspective politique.
Soutenir les initiatives et les combats de la société civile palestinienne
Nous développons nos relations avec l’ensemble des composantes de la société palestinienne, notamment ses partis politiques, ses syndicats, et les associations et ONG représentant la société civile, ainsi qu’avec ses institutions et avec l’OLP. Nous condamnons dans tous les cas les atteintes aux libertés pour le peuple palestinien, y compris par les autorités palestiniennes en Cisjordanie et à Gaza.
Etant nous-mêmes une organisation de la société civile en France, nous développons tout particulièrement nos relations avec la société civile palestinienne : organisations de défense des droits de l’Homme, organisations de la résistance populaire, ONG et organisations locales impliquées dans le développement humain et l’activité économique en Palestine et dans les camps de réfugiés.
L’importance de nos alliances et de notre ouverture au monde
Les plateformes, coalitions et coordinations auxquelles nous participons jouent un rôle essentiel dans la mobilisation de la société française pour les droits du peuple palestinien. Au sein de la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine, du Collectif national, de la coalition que nous avons constituée sur le tramway de Jérusalem et sur les banques, nous travaillons avec nos partenaires en respectant les objectifs et la logique d’action de chacun d’entre eux.
Notre participation active à la CECP, la coordination européenne des comités et associations pour la Palestine, est essentielle pour porter notre voix à Bruxelles et coordonner nos actions. Elle est complétée par notre participation à la coordination européenne de la campagne internationale BDS. Nous sommes ouverts à ce qui se passe ailleurs et apprenons de nos partenaires ; nous avons de plus en plus conscience de prendre notre part à un combat mondial pour des valeurs partagées de justice et d’égalité, ces valeurs que porte la lutte pour les droits du peuple palestinien.